Chers voeux

bonjour,

le 30 décembre 1924, Guillaume et Georgette envoient leurx voeux de nouvelle année à M. Cauvart, en Côte d'Or. Normal.

Ils affranchissent leur carte postale illustrée à 10 centimes au verso, prennent soin de ne rien écrire côté vue, et notent cinq petits mots dans le cadre réservé à cet effet au recto : "Tous nos meilleurs voeux pour" et ils rajoutent 1925, sinon ça ne veut rien dire. Dans leur esprit, ils sont pile dans le tarif de la carte illustrée de cinq mots maxi en vigueur depuis mars 1924.

Le postier au dpart ne l'entend pas de cette oreille, il compte 1925 pour un mot complet, plus de cinq mots ça paye 15 centimes, il demande la taxe, probablement sur la base de 15 -10 = 5 X 2 = 10 centimes de taxe, sachant qu'il existe à cette époque un minimum de perception de la taxe de 20 centimes. C'est vache !

Le postier à l'arrivée voit la demande de taxe, il se creuse le citron pour savoir à quoi ça correspond, et là, pris d'une subite crise de déliriome très mince, il invoque l'arrêté du 30 juin 1922 et applique sauvagement une amende de 1 franc pour dépassement des limites de la zone d'écriture autorisée, plus le minimum de perception de la taxe pour l'affranchissment.



D'une part, l'amende ne s'imposait déjà pas dans le texte de la loi du 29 mars 1920 art. 7 ni de l'arrêté du 30 juin 1922 art.6, mais en plus ce dernier arrêté a été rapporté en février 1923 en ce qui concerne les CP.



Je sais bien que c'est vilain de rapporter, mais quand même ...

Un peu de lecture ici :

http://jef.estel.pagesperso-orange.fr/taxeamende.html

D.

Bonjour Doudad,

Jolie trouvaille et effectivement cela fait cher !
Ce postier devait avoir de sérieux problèmes personnels pour aller pinailler à un tel point.
Le lien m'a permis de relire un article instructif et bien troussé  

Francois

Jolie trouvaille en effet.

bonjour,

ça vous taraude certainement de savoir à quelle date cette fameuse taxe-amende de 1 franc instaurée par l'article 7 de la loi du 29 mars 1920 a été abrogée pour les OPR (incluses les CP sous bande et enveloppe ouverte). Et d'abord, a t'elle bien été abrogée ? Hein ?

Et vous n'osez pas me le demander.

Dans mon infinie bonté, je vais quand même vous répondre.



Elle a été annulée par l'article 41 de la loi de finances du 19 décembre 1926, ce qui veut dire qu'elle figure encore dans le tarif du 8 août précédent, I-Service postal, 4° §4 et NOTA.

Du coup, le fraudeur-envoyeur d'une CP envoyée sous bande affranchie à 0,15 franc en 1927 sur laquelle il a écrit "Bons baisers, Gaston", au lieu de faire payer 1,20 franc au destinataire (deux fois 10 centimes par rapport au tarif de la CPI 5 mots + 1 franc d'amende), ne lui fera plus payer que 70 centimes (50 - 15 X 2).

Ce qui fait un peu moins cher.

D.

Bonsoir,

en tout cas, monsieur Cauvard n'a pas voulu s'en laisser conter et a, on le lit en haut à droite, purement et simplement refusé la carte, et la taxe afférente !

L.

bonjour,

ces grosses taxes-amende (celle de 1910 et celle de 1920) ont été quasi-systématiquement refusées par les destinataires, d'autant qu'elles ne concernaient généralement que des messages de voeux ou de vacances faciles à deviner. Ci-dessous, une carte de voeux taxée acceptée en 1912, mais on peut supposer que Mme Finance avait les moyens de payer.



Du coup, elles sont beaucoup plus rares acceptées que refusées. Lorsque l'expéditeur était identifiable, les objets refusés étaient détaxés et retaxés, et l'envoyeur devait payer. Mais évidemment, sur les cartes postales illustrées, c'est assez rare qu'on détaille son curriculum, du coup les postes envoyaient aux rebuts sans perception. C'est probablement en grande partie pour ça que la surtaxe a été supprimée pour les CP à découvert en février 1923.

D.

Bonjour,

Pas tout à fait d'accord sur certaines affirmations.

De nombreuses taxes-amendes concernaient d'autres objets que les cartes de vœux, mais ils n'ont pas autant été conservés que celles-ci (qui étaient récupérées par des particuliers qui pouvaient montrer ensuite qu'ils avaient bien souhaité leurs vœux).

L'Administration avait aussi la possibilité de réclamer la taxe au retour à l'expéditeur, y compris de façon "forcée".

Les cartes postales n'étaient pas envoyées aux rebuts, contrairement aux autres objets, puisque ceux-ci ne pouvaient pas identifier mieux les expéditeurs que les bureaux eux-mêmes.

Il y a eu renoncement à ces sanctions aussi à cause des réclamations (on n'était pas à l'époque des gilets jaunes mais presque).

Enfin, mais c'est anecdotique, l'expéditrice de la carte était seule (même si elle écrivait "nous") et s'appelait Georgette Vuillaume.

bonjour,

Bonif a écrit:

De nombreuses taxes-amendes concernaient d'autres objets que les cartes de vœux

certes, j'aurais dû préciser "CPI", mais on connaît tout de même d'assez nombreux imprimés refusés retournés retaxés (en particulier sur la loi de 1910).

Citation :

L'Administration avait aussi la possibilité de réclamer la taxe au retour à l'expéditeur, y compris de façon "forcée".

Sur les CPI, sans l'adresse de l'expéditeur, ça restait difficile.

Citation :

Les cartes postales n'étaient pas envoyées aux rebuts, contrairement aux autres objets, puisque ceux-ci ne pouvaient pas identifier mieux les expéditeurs que les bureaux eux-mêmes.

OK. Que devenaient ces objets dont l'expéditeur n'était pas identifiable ?

D.

Les cartes postales (sans indication de l'adresse de l'expéditeur) étaient conservées dans les recettes principales des départements.
Elles servaient aux cours locaux de tri.
Cela est devenu officiel lorsque les centres de tri sont devenus autonomes et cela se pratiquait encore au début des années 2000.
Les cartes en retour sorties par centaines sur le marché philatélique proviennent de ces centres.

Bonjour,

Bonif a écrit:

Les cartes en retour sorties par centaines sur le marché philatélique proviennent de ces centres.

Bravo Laurent, il n'y a que toi pour savoir ce genre de choses que nous autres, « déconnectés de la réalité », ignor(i)ons !

Bruno

Oui, effectivement, si elles avaient été rebutées, nous ne les connaîtrions pas. L'idée m'avait effleuré ...

D.