Doudad Maitre en Gallica
Nombre de messages : 18465 Localisation : Terre du Milieu Date d'inscription : 12/12/2006
| Sujet: Cohabitation Mer 17 Déc 2014 - 18:12 | |
| bonsoir, une petite histoire de postiers, de celles qui nous font aimer l'Histoire postale. En 1873, l'Espagne se livre encore et déjà à la guerre civile, les rebelles carlistes (royalistes légitimistes) s'étripent avec les gouvernementaux (républicains libéraux). En juillet, les carlistes repoussent les libéraux vers l'ouest, au-delà de Valmaseda, à l'ouest de la Biscaye, et occupent la ville. Ils remplacent bien évidemment toute l'ancienne administration par la leur. Toute ? Non ! Par un improbable concours de circonstances, le bureau de poste gouvernemental reste en place, avec armes, timbres-poste, tampons et bagages, conjointement avec le bureau de poste carliste (qui utilise des TP carlistes), et il continue comme si de rien n'était à échanger son courrier avec le bureau libéral de Ramales de la Victoria, et au-delà avec le reste du Monde, via Santander. Personne n'y trouve rien à redire, la situation satisfaisant tout le monde. La direction des postes carlistes de Biscaye envoie un message à son postier, pour lui demander s'il a pu récupérer le matériel ancien. Benoîtement, le gars répond que non (vu que c'est son collègue libéral qui l'a gardé), et sa hiérarchie lui envoie donc un cachet postal carliste tout neuf. En septembre 1874 (quinze mois plus tard, tout de même), la direction carliste découvre la situation, engueule le postier carliste, qui se défend en plaidant que c'est tout de même bien pratique d'avoir les deux bureaux, mais l'armée carliste reçoit l'ordre de fermer le bureau libéral et d'en arrêter le postier (je ne sais pas ce qui lui est finalement arrivé). Le plus curieux de l'histoire, c'est que le bureau libéral fonctionnait en toute normalité gouvernementale, vendant même les fameuses vignettes "Impuesto de guerra" obligatoire sur le courrier intérieur libéral, et qui servaient à financer la guerre contre les carlistes. Il reste quelques (rares) témoignages, comme cette lettre du 29 nov. 1873, pour Londres, affranchie avec un timbre-poste du Gouvernement espagnol à 50 centimes (tarif de la lettre affranchie de 10 gr depuis le 1/10/1870), reçue le 4 décembre, ayant voyagé plutôt par voie de mer directe (paquebots anglais) que par la voie de mer de Bayonne (cf un excellent article paru dans les DP d'il y a trois mois), vu l'absence de timbre d'entrée français au recto. Si cette lettre n'avait pas pu être envoyée par le bureau libéral, elle aurait été confiée à la poste carliste, serait entrée en France par le Pays Basque, utilisant un système complexe de double enveloppe, d'achemineur et de double affranchissement (les timbres-poste carlistes n'étant pas reconnus hors de la zone carliste). J'ai trouvé cette histoire dans mon exemplaire dédicacé (veinard ! ) des Discours Académiques espagnols XXXIII (RAHF), " Le Courrier carliste basco-navarrais, ses dateurs et oblitérateurs (1873-1876)", de mon camarade d'Agora Julio Peñas, que je salue. D. _________________ dubito, ergo sum
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