Boite mobile... sur le quai

Bonjour à toutes et tous,

La lettre présentée ci-dessous, malgré un pli malheureux touchant le TP, est intéressante par sa suscription : les expéditeurs (Giraud Frères, de Marseille) y ont précisé le nom du navire à emprunter : "Par Tibre". Arrivé sur le quai, le jeune commis* que j'imagine haletant, car il sait ses patrons impitoyables sur ces question de départ ponctuel du courrier, ne peut que constater que le Tibre vient de lever l'ancre...
Il échappera à la sanction (retenue sur salaire, eau et pain sec à la pause méridienne,...) car sur le quai se trouve encore une seconde boite de paquebot : celle du Godavery.






Il faut dire que la lettre est adressée à Messine (Sicile) et que les deux navires font de ce port leur première escale : le Tibre sur la ligne de Syrie, le Godavery sur celle de Constantinople. C'est Le Sémaphore de Marseille qui nous le confirme :



Peut-être est-ce l'agent embarqué qui a pris la peine de rectifier le nom du navire sur la suscription. En tout il oblitère bien le timbre et frappe son dateur (qui n'est plus au nom du navire mais, depuis 1866, au nom de la ligne, identifiée par une lettre et un numéro d'ordre de la rotation effectuée, ici la 2°).


Un bien long préambule pour poser une question : JF et François ont, sous le sujet "boite mobile", proposé des illustrations et photos de boites mobiles sur diligence ou courrier d'entreprise... Je n'ai jamais trouvé de photo ou d'illustration d'un quai avec cette boite mobile maritime fixée à l'embarcadère. Si cela vous parle ou dort dans votre photothèque, je serais preneur** !


Laurent.

* à cette date, cela fait plusieurs années que les paquebots-postes ne partent plus du Vieux-port mais de la Joliette
** Doudad, même sans les fleurs

Le Godavery (du site "messageries maritimes" d'O. Ramona) :

Post-scriptum,

le Godavery fait partie de ces quelques (malheureux) paquebots-poste des Messageries impériales qui ont dû utiliser, du temps où les dateurs étaient au nom du navire, un timbre à date avec orthographe erronée : GODEWERY (en 1863-64) au lieu de GODAVERY (rectifié en 1865) :



(correct en haut, trajet Marseille - Constantinople ; erroné en dessous, trajet Constantinople - Marseille : lettres remises, donc, à l'agent embarqué ou dans la boite mobile à quai)

L.

bonjour,

encore une fois un beau courrier et un beau commentaire (je ne répond pas à chaque fois, mais je lis et j'apprécie).

Pour la boîte marine, je n'en ai qu'une en stock, et british en plus (je parie qu'elle est peinte en rouge). Mais sans fleurs, et pas à quai, à pont, au bout de sa ficelle (pardon, de son boute).



D.

Bonsoir à toutes et tous,

merci, Doudad !



A ma droite donc, une magnifique boite anglaise, du temps du bon roi George. Qui fait une autre offre ? On rappelle le challenge : si possible du XIX°, et éventuellement sur le quai...

Plus sérieusement, j'ai scruté des photos sans pouvoir rien trouver. Les tableaux contemporains (années 1850-1860) peuvent être une source, là aussi, chou blanc pour l'instant.

Au détour de ma recherche : le paquebot Périclès des M.I. ancré dans le port de Marseille : à cette date le navire n'accoste pas encore. On distingue clairement les barques amenant les passagers.





A suivre, si vous le voulez bien.

L.

Doudad,
Ton éloignement de l'océan te permet d'être excusé !
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bout_(cordage)

Bonjour à toutes et tous,

si les paquebots-poste disposaient  d'une vraie "boite" mobile, les bâtiments du commerce avaient manifestement recours à des moyens plus simples. Entrefilet relevé dans l'édition du 21 mai 1859 du Phare de la Loire, à propos du départ de Nantes d'un navire pour l'île Maurice.



L.

bonjour,

les capitaines du Commerce étaient soumis à des obligations vis-à-vis de la poste. Un décret royal, daté du 14 décembre 1725, enjoint aux "Maistres de Navires, Barques, Galiottes et Chaloupes, de porter & envoyer toutes les lettres & paquets de lettres, & papiers, dont ils seront chargez, dans les Bureaux des Postes des Villes où ils arriveront ..."

L'article de Henri Charriaut, "La poste maritime au XVIIIè siècle" Privat, Annales du Midi, tome 3, n°15, juillet 1951 nous donne quelques précisions sur ces sacs de lettres.

https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1951_num_63_15_5841

Et sur la façon dont ils pouvaient être traités, plus ou moins bien, voire même jetés à la mer.

D.

Bonjour Doudad,

la description du sieur Jaudin est en effet édifiante*... Merci pour la référence à ce précieux article.

Laurent

(*) et pas sans rappeler certains textes de voyageurs européens décrivant les services postaux du sultan dans l'Empire ottoman au milieu du XIX° siècle encore, ou en Perse, comme j'ai pu en lire.

Bonsoir Doudad,

Merci   pour cette lecture.
Elle apporte un éclairage intéressant sur un sujet que je connais que de loin.
Amusant aussi de retrouver un vocable et une orthographe d'un autre age : " elles (les lettres) se distribuaient ainsy sans fraix , et ce qui est plus important sans retardement".
 

François

Bonsoir,

Dans les différentes éditions papier du Code des Postes, y compris dans celle datée de 2006*, il y avait encore ceci:

"Article L4


Tout capitaine ou membre de l'équipage d'un navire arrivant dans un port de France est tenu de porter ou envoyer sur-le-champ au bureau de poste du lieu toutes les lettres et tous les paquets qui lui ont été confiés autres que ceux constituant la cargaison de son bâtiment."

Il a été abrogé le 1er novembre 2005 (seulement!) par l'article 5 de la loi 2005-516 du 20 mai 2005*

* l'édition de 2006 comportait en principe les textes à jour au 6 mars 2006, mais n'avait pas tenu compte de cette loi relative à la régulation des activités postales

Bonif a écrit:

Bonsoir,

Il a été abrogé le 1er novembre 2005 (seulement!) par l'article 5 de la loi 2005-516 du 20 mai 2005*

Acta est fabula...

Merci Laurent pour l'épilogue !

L.