Superfétatoire

bonjour,

on dit généralement qu'en matière d'histoire postale, les lettres portant un affranchissement superfétatoire sont moins intéressantes que celles au bon tarif. Sauf exception.



L'expéditeur de cette lettre écrite à Clermont le 7 avril 1868 a commis une double erreur. D'abord, il a affranchi sa lettre locale à 20 centimes au lieu de 10 centimes, et ensuite il l'a jetée dans la boîte mobile de la gare, alors que son usage était réservé au courrier quittant la ville par le train. Le sous-agent en gare (entreposeur) n'était pas habilité à juger du pourquoi du comment de la chose, il a apposé son timbre au recto sans oblitérer, et il a fait dépêche pour la brigade B de l'ambulant CLERMONT A PARIS. La dépêche a été ouverte dans le wagon, le timbre oblitéré par le losange échoppé CfP ( http://pagesperso-orange.fr/jef.estel/ambulant.html ), et le timbre d'ambulant apposé au dos. La lettre étant destinée au point de départ du train, l'ambulant a profité de la présence d'un bureau de passe à Moulins-sur-Allier pour lui faire faire un demi-tour et la renvoyer d'où elle venait. Dépêche adressée au bureau de passe 2565, qui a apposé son timbre au dos, et a fait à son tour dépêche pour le bureau de poste sédentaire de Clermont-Ferrand. La dépêche a été remise close au bureau ambulant descendant de nuit PARIS A CLERMONT, et la lettre a été distribuée le lendemain matin à Clermont, alors que selon l'heure de son dépot, elle aurait peut-être pû l'être la veille au soir, mais ce n'est pas certain ... Tout ce travail s'est effectué de nuit.



Des lettres au tarif local ayant subi ce type de traitement sont connues, elles portent la mention manuscrite "Boîte de ..." (gare de dépot), pour leur éviter d'être taxées pour insuffisance dans le tarif territorial. Ici, la lettre étant (par erreur) au tarif territorial, la mention manuscrite "Boîte de Clermont" ne s'imposait pas.

Une double erreur de l'expéditeur qui rend une petite enveloppe, à l'origine très banale, supérieurement intéressante, du coup .

D.

PS : je m'intéresse aux lettres de Clermont, à l'ambulant CLERMONT A PARIS et aux boîtes mobiles de gare, je ne pouvais pas la louper, celle-là .

Doudad a écrit:

Une double erreur de l'expéditeur qui rend une petite enveloppe, à l'origine très banale, supérieurement intéressante, du coup .

D.

PS : je m'intéresse aux lettres de Clermont, à l'ambulant CLERMONT A PARIS et aux boîtes mobiles de gare, je ne pouvais pas la louper, celle-là .

Bonjour,

Double erreur ou pas... "Bah, se dit le bourgeois, j'ai la flemme d'aller plus loin que la gare, il est déjà tard, mon souper m'attend et il y a le match de foot à la télé à suivre. Je ne suis pas à dix centimes près, tout de même, et ma lettre arrivera toujours, jeudi au plus tard." (On est un mardi.)



Bruno

On l'avait prévenu, pourtant (circulaire 487 - BM 133 - sept. 1866, Etablissement de nouvelles boîtes aux lettres aux gares de chemin de fer ...)

Bonsoir,

S'il n'y avait que l'erreur de boîte, je dirais un estranger
Mais en doublant l'affranchissement?

Un ancêtre de Pierre Dac peut -être.

François

Salut Doudad,

Ta lettre est intéressante, mais tu oublies une éventualité.
Et si ta lettre pesait plus de 10 g jusque 20 g, les 20 c seraient alors justifiés. On serait ici en présence d'une double port local. Intérêt supplémentaire!
Le timbre a 20 c a sûrement troublé l'agent de la gare de Clermont.

Emmanuel.

bonjour et bienvenue sur ce forum,

je n'ai pas retenu cette hypothèse, d'une part parce qu'il s'agit d'une enveloppe de petit format, d'autre part parce que l'indication de second port (poids en grammes ou chiffre 2) n'y figure pas en haut à gauche, mais enfin, et surtout, parce que s'il s'agissait d'un double port local, elle serait en suspicion d'insuffisance d'affranchissement sur son trajet territorial, et dans ce cas, l'agent de l'ambulant aurait noté au crayon "Boîte de Clermont" pour indiquer à ses collègue qu'elle n'avait pas lieu d'être taxée, puisque sortie par erreur de sa circonscription.

Donc, port simple superfétatoire, indubitablement.

L'affranchissement n'avait pas lieu de troubler le sous-agent en gare de Clermont, puisque celui-ci n'était pas habilité à le vérifier, à cette date.

D.

Bonjour Doudad,

Quand je disais que le sous agent manipulateur a été troublé, il faut comprendre qu'il a été troublé par la couleur du timbre, car pour un postier, le bleu= simple port territorial et le bistre= simple port local. Cette méprise aura été renforcée par le fait que la lettre avait été jetée par erreur dans la boite de la Gare. Les couleurs de timbre étaient suffisamment différentes pour qu'il n'y ait pas de méprise. L'histoire du 1 Fr Vermillon et du 40 c orange en est la preuve.
Les agents manipulateurs faisaient un pré-tri des lettres trouvées dans la boite de Gare. Ils pouvaient confectionner des dépêches pour les ambulants (courriers territoriaux) ainsi que des dépêches pour le bureau de poste de la ville où se trouvait la gare (s'il y en avait un). Ces dernières dépêches évitaient aux lettres locales de parcourir le trajet de l'ambulant dans les 2 sens pour revenir à leur point départ.
De plus comme c'était un agent manipulateur et qu'il possédait un timbre à date, il n'était pas tenu d'apposer la mention "boite de....". Car pour le coup, en plus du timbre à date, c'est la mention "boite de..." qui était superfétatoire. Cette affirmation est à vérifier tout de même.
Quant à la mention du poids, elle n'était pas toujours indiquée, loin s'en faut. Voici 4 exemples de double et triple port locaux qui ne comportent aucune mention de poids. Il est vrai qu'ils concernent des cas différents de celui de ta lettre.




Sans la correspondance, on ne peut émettre que des hypothèses. Cependant comment l'expéditeur aurait pu être ignorant des tarifs postaux au point de sur affranchir sa lettre de la ville pour la ville. 10 c à l'époque représentait une petite somme.
Quoiqu'il en soit c'est une lettre intéressante, mais qui à mon avis garde une petite partie de mystère.
Avec l'Histoire Postale, on passe souvent plus de temps à chercher qu'à trouver....

Emmanuel
http://pagesperso-orange.fr/losanges.chiffres

vals59 a écrit:

Quand je disais que le sous agent manipulateur a été troublé, il faut comprendre qu'il a été troublé par la couleur du timbre

oui, je suis d'accord, mais il est bien précisé que les "préposés sont dispensés ... de vérifier l'affranchissement" (circ. 508 fév. 1867), donc la couleur du timbre n'aurait pas dû le concerner.

Citation :

Les agents manipulateurs faisaient un pré-tri des lettres trouvées dans la boite de Gare. Ils pouvaient confectionner des dépêches pour les ambulants (courriers territoriaux) ainsi que des dépêches pour le bureau de poste de la ville où se trouvait la gare (s'il y en avait un). Ces dernières dépêches évitaient aux lettres locales de parcourir le trajet de l'ambulant dans les 2 sens pour revenir à leur point départ.

oui, d'accord aussi, notre entreposeur s'est gourré de dépêche - peut-être à cause de la couleur du timbre, mais ça ne l'excuse pas, il pouvait avoir dans sa boîte des lettres territoriales postées après l'heure de dernière levée des boites urbaines (circ. 487 sept. 1866) et destinées à des bureaux non desservis par le chemin de fer, affranchies en bleu.

Citation :

De plus comme c'était un agent manipulateur et qu'il possédait un timbre à date, il n'était pas tenu d'apposer la mention "boite de....". Car pour le coup, en plus du timbre à date, c'est la mention "boite de..." qui était superfétatoire. Cette affirmation est à vérifier tout de même.

En fait, ce n'est pas l'entreposeur qui applique la mention "Boîte de ..." à la plume, il n'y est pas habilité, c'est l'agent de l'ambulant qui relève la boîte. Là, il y a une ambiguïté, techniquement ce n'est pas l'ambulant qui a levé notre boîte boîte, c'est l'entreposeur, et effectivement, son timbre de gare peut faire double emploi avec la mention manuscrite. Il faudrait trouver un affranchissement local (1er échelon) relevé par un entreposeur et confié à un ambulant, pour voir si la mention figure. Pas simple ... mais je pense que oui, pour éviter les taxations abusives (circ. 70 juin 1861, donc avant l'autorisation de levée des boîtes par les entreposeurs).

Citation :

Avec l'Histoire Postale, on passe souvent plus de temps à chercher qu'à trouver....

ça, c'est bien le seul truc dont je sois sûr .

D.

Je m'en veux un peu . Le coup de l'entreposeur qui indique le mention "boite de..." au lieu de l'ambulant, c'est la boulette!
On croit souvent qu'au XIXème le réglement était suivi au millimètre par les préposés. En fait, il y avait beaucoup d'erreurs, quelques fois corrigées d'autres fois non.
D'autre part, je n'ai personnellement jamais vu de lettre portant un timbre à date de gare et la mention "boite de...". J'ai regardé dans la littérature sur le sujet et on y dit qu'à partir de 1867, toutes les gares disposant d'un agent des postes sont munies d'un timbre à date de gare. Donc finalement plus besoin de la fameuse mention. Cette dernière reste valable pour les autres gares dans le cas de lettres en port local jeté par erreur dans une boite mobile de gare.

Emmanuel.
http://pagesperso-orange.fr/losanges.chiffres/

Selon J.P. Schroeder (Les boîtes de gare - DP109 p.34), les erreurs de ce type ont cessé à partir de 1866, avec l'autorisation faite aux entreposeurs de relever les boites mobiles. On ne devrait donc plus retrouver de lettres baladeuses avec timbre de gare après 1866, et partant, pas non plus avec mention "Boîte de ..."

Du coup, ma lettre est d'autant plus curieuse, puisque hors période de levée par l'ambulant et néanmoins "baladeuse". Qu'elle soit en simple ou double port ne change donc finalement rien, elle n'aurait pas dû faire son détour, quoi qu'il en soit.

J'en ai une de 1869, mais y avait-il un entreposeur gare de l'Est ? En tout cas, la mention manuscrite avait encore cours.



D.

Il y avait sûrement un entreposeur à la gare de l'Est. Le verso de la lettre porte-t-il le timbre à date de l'ambulant Strasbourg-Paris?
J'ai une lettre de 1873 portant encore la mention "boite de..." (difficillement lisible) alors qu'un entreposeur se trouve à la gare de Lille.



Cette lettre a été prise en charge par l'ambulant de jour lors de l'arrêt en gare.Cependant le verso de la lettre ne porte pas de trace de timbre à date de l'ambulant Paris-Lille.
Oubli? Probable puisque les timbres à date de Lille et Lille-Fives date du lendemain.

Emmanuel.
http://pagesperso-orange.fr/losanges.chiffres