Doudad Maitre en Gallica
Nombre de messages : 18465 Localisation : Terre du Milieu Date d'inscription : 12/12/2006
| Sujet: Effet boule de neige Mer 13 Juin 2018 - 18:41 | |
| bonjour, tout le monde connait l'histoire du jeune Buonaparte, stratège en culottes courtes, qui organisait des war games à coups de boules de neige dans la cour du collège de Brienne, sous l'oeil ému des bons pères. Et bien, figurez-vous qu'il s'agissait là d'une conception totalement visionnaire de l'Art de la Guerre, et qu'elle fut reprise à la lettre par le général Darmagnac en février 1808 lorsqu'il fut question de s'emparer en douceur de la citadelle de Pampelune. Napoléon avait signé un traité avec Godoy (secrétaire d'Etat du roi d'Espagne) qui permettait aux français de traverser l'Espagne pour aller s'occuper du Portugal. Du coup les français pouvaient pénétrer dans les villes, mais sans pouvoir occuper les places fortes. Napo, qui avait une petite idée en tête, décide de s'emparer mine de rien du trône espagnol (pas pour lui, pour la famille). Il demande à Murat de regrouper tout son petit monde et d'aller sur Madrid comme à la parade, et aux visiteurs des villes fortes (Pampelune et Barcelone) d'occuper les citadelles, d'y laisser une garnison réduite, et de venir soutenir Murat sur ses arrières. Darmagnac doute de ses possibilités de prendre la place par la force, il opte pour la ruse. Le récit fait dans cette lettre (en 1827) émane d'un officier supérieur de sa suite, c'est donc un témoignage de première main sur la ruse (restée fameuse, puisque lorsque les libéraux voudront reprendre Pampelune aux carlistes en 1873, les observateurs estimeront que la saison est trop avancée pour rouler des boules de neige) du général. " Il a pris la citadelle de Pampelune, une des plus fortes d’Espagne, avec des pelotes de neige : ce sont, comme tu vois, des projectiles d’un genre tout à fait nouveau. C’était en 1807 ou 1808, au commencement de l’occupation de l’Espagne par les troupes de Bonaparte. Le général d’Armagnac occupait la ville avec deux mille hommes, un général espagnol tenait la citadelle avec une force à peu près égale, et les deux toujours vivaient ensemble politiquement. Le général français reçoit l’ordre impératif de s’emparer de la citadelle, il n’eut pas été prudent à lui de répondre que c’était impossible, il fallait exécuter : il tente d’abord les voies diplomatiques pour s’introduire dans la citadelle où y mettre seulement un poste, le commandant espagnol ne veut entendre à rien ; il ne pouvait songer à employer la force, puisqu’il n’avait que peu de forces sans artillerie, et que la citadelle était bien armée ; il ne restait donc que la ruse. Les troupes françaises devaient tirer leurs vivres des magasins établis dans la citadelle, et quoique le commandant espagnol ne voulut recevoir les corvées que sans armes et par bandes, dont le nombre était déterminé, c’est pourtant par ces corvées qu’on s’emparât de la citadelle. Un corvée commandée par un officier de tête et composée d’hommes de choix entre dans la place, celle qui devait la suivre attendait au bas du glacis. Quelques soldats de celle-ci, qui étaient dans le secret, prennent des pelotes de neige et font une petite guerre ; deux ou trois fuient devant les autres, toujours en se battant, et se dirigents, sans paraître y mettre de l’intention, sur la porte de la ville : les soldats de garde espagnols, au nombre de 50 sortent de la porte pour jouir de ce spectacle. Lorsque les deux ou trois soldats français furent près d’eux, les espagnols voulurent les faire reculer ; mais ils sautèrent sur le pont-levis, s’attachèrent aux chaînes pour qu’on ne put pas le lever et appelèrent leurs camarades qui accoururent ; au même instant, l’officier français qui était entré se précipite dans le corps de garde, se saisit des armes de la garde et fait au général d’Armagnac, qui était aux aguets, le signal convenu. Celui-ci court avec sa petite armée et fait la garnison prisonnière avant qu’elle ait pu se réunir et sans qu’elle ait tiré un coup de fusil." Lettre écrite à Carcassonne le 22/04/1827, signée HJ ou PJ, adressée à Madame de La Paillonne née Françoise Mélanie Pernety à Valence Drôme. Thiers, historien sérieux (Histoire du Consulat et de l'Empire Tome 8 / Paulin (Paris) 1845) ne parle pas des boules de neige. Mais d'autres ne sont pas passés à côté, avec plus ou moins de détails. Et les espagnols l'ont trouvée saumâtre. Le comte de Torénp (Histoire du soulèvement, de la guerre et de la révolution d'Espagne. Tome 1 / par M. le comte de Toreno, José María Queipo de Llano Ruiz de Saravia, Paulin (Paris) 1835) nous donne le nom de l'officier "de tête" qui s'est introduit dans le corps de garde, le chef de bataillon Robert, déguisé en bourgeois. La date devait être le 15 ou 16 février 1808. Espagne par M. Joseph Lavallée, Firmin-Didot frères (Paris) 1844 Notice biographique sur le curé Mérino par Don Mariano Rodríguez de Abajo, F. Poisson (Caen) 1846 Tout ça pour dire qu'il faut lire ses vieilles lettres (mais vous le saviez, les Feuilles Marcophiles, qui s'y connaissent, vous l'ont déjà dit). D. _________________ dubito, ergo sum
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Mare Nostrum
Nombre de messages : 1837 Localisation : Ardèche Date d'inscription : 08/02/2018
| Sujet: Re: Effet boule de neige Mer 13 Juin 2018 - 20:01 | |
| Jolie histoire ! La neige n'a pour autant pas toujours porté chance à la Grande armée... la retraite de Russie par Adolphe Yvon (1817-93) Laurent. |
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Doudad Maitre en Gallica
Nombre de messages : 18465 Localisation : Terre du Milieu Date d'inscription : 12/12/2006
| Sujet: Re: Effet boule de neige Mer 13 Juin 2018 - 20:36 | |
| - Mare Nostrum a écrit:
- La neige n'a pour autant pas toujours porté chance à la Grande armée ...
... oui, les Grognards de Russie ont eu la neige, et les boules. D. _________________ dubito, ergo sum
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frame
Nombre de messages : 4865 Age : 71 Localisation : Aubagne Date d'inscription : 09/11/2009
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carbone14
Nombre de messages : 868 Age : 71 Localisation : Ici ou là Date d'inscription : 16/06/2018
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