pli de Paris pour Evreux en 1756 sans marque

Bonjour à tous.
Un correspondant me demande pourquoi ce pli de 1756 au départ de Paris pour Evreux ne comporte aucune marque.
Merci à tous.
François

bonjour,

l'expéditeur scelle des armes de La Tour d'Auvergne-Turenne, très grande famille de l'époque.



Ce qui se lit, écartelé, aux un et quatre d'azur semé de fleurs de lys d'or et à la tour d'argent maçonnée et ouverte de sable (qui est de la Tour), en deux d'or aux trois tourteaux de gueules (qui est de Boulogne), et au trois coticé d'or et de gueules de huit pièces (qui est de Turenne), sur le tout parti d'or au gonfanon de gueules frangé de sinople (qui est d'Auvergne) et de gueules à la fasce d'argent (qui est de Bouillon).

La taxe normalisée 4 me semble furieusement anachronique   .

D.

EDIT : peut-être pas, après tout, les deux se trouvent en 1756.



re-EDIT ça m'évoque tout de même une frappe de chiffre-taxe (au tampon, avec des projection d'encre le long du chiffe).

Doudad continue de nous étonner
nous le découvrons "maître en héraldique"

quelle corde n'a t il pas à son arc?
pescator

Comme on dit, j'en suis totalement baba !!  Perso, je n'avais pas vu grand chose sur le cachet de cire. Alors de là à pouvoir l'identifier, j'en suis très très loin.

Sinon, je vois une marque postale, une taxe 4 Finalement, c'est ce qui compte, faire payer l'usager, le reste n'est qu’accessoire

Merci à toi. Je ne sais pas comment tu as fait pour identifier les armes de la Tour d'Auvergne à partir du cachet de cire ? (Même si l'Auvergne ne t'est pas inconnue). Cela n'explique pas l'absence de marque de départ à Paris.
François

Je n'ai pas de mérite, je suis en territoire connu. Pas que je cultive une passion dévorante pour la noblesse, mais je me suis beaucoup intéressé à l'histoire médiévale de ma région d'adoption, et fatalement, comme on y parle plus souvent de nobles que de gueux ...

Ce qui tire l'oeil de l'héraldiste (amateur) auvergnat, sur le sceau, ce sont les trois billes en haut à droite, armes de Boulogne. Qu'est-ce que Boulogne vient faire là-dedans ? Tout simplement que Robert V, comte d'Auvergne au XIIIème siècle, en a acquis les droits (impôts, justice et le toutim) auprès d'un sien cousin duc de Brabant. Le roi Louis XI l'échangera plus tard contre le Lauragais, comme les mômes avec les cartes Pokemon.

Les barres du bas ramènent illico à Turenne. Et pourquoi donc ? Parce que le comte Agne IV a épousé la duchesse Anne de Beaufort, vicomtesse de Turenne, en 1444, ce qui lui donne le droit d'en coller le logo sur ses bijoux de famille. C'est décoratif, à défaut d'autre chose.

Ceci étant, la logique veut alors que les deux autres quartiers soient identiques et représentent une tour sur fond de lys, puisque chacun devrait sçavoir que Bertand IV de la Tour-d'Auvergne a introduit ce symbole hautement phallique dans le giron de la comtesse d'Auvergne en place, Marie de Boulogne.

Rajoutez par-dessus le gonfanon clermontois que l'on trouve dès la fin du XIIème siècle sur le sceau du comte Robert IV, plus une louche de Bouillon pour lier le tout. De quoi est donc fait ce Bouillon ? Du mariage d'Henri de La Tour d'Auvergne, vicomte de Turenne (le père DU Turenne), qui épousa Élisabeth de Nassau, héritière du nom, au XVIème siècle.

On m'a présenté il y a quelques années la photo d'une plaque de cheminée (brisée, hélas), qui présente toute cette généalogie :



On y retrouve à gauche la partie Auvergne-Turenne (le coticé est inversé, j'ignore pourquoi), et en haut à droite la partie Orange-Nassau de l'épouse d'Henri de la Tour (on y retrouve Bouillon dans le quart S-O). Et en bas à droite, très incomplètes, les armes de Bourbon-Montpensier, famille bourbonnaise de la mère d'Elisabeth de Nassau.

Les armoiries sont en fait une sorte de fiche d'Etat-Civil. Et en l'occurrence, elles nous ont permis d'identifier (à peu près) l'expéditeur de la lettre. Ce qui n'est pas rien.

D.

Merci pour ce joli cours d'histoire.

Comme quoi ce pli nous a permis de découvrir une corde de plus que tu as à ton arc.

Il est vrai que l'Auvergne est une belle région. Mon défunt beau-père vivait dans un ancien moulin du côté d'Aurillac, à Laroquebrou, au fond des bois. J'y avais emmené mes deux filles alors qu'elles avaient 3 et 8 ans (c'était il y a 40 ans). Elles gardent un souvenir ému de la faune, notamment des araignées qu'il fallait protéger contre les moustiques et les nombreux frelons qui peuplaient la cheminée. J'y ai également emmené des élèves du côté du Puy-en-Velay, très belle région pour y découvrir son passé volcanique.

François

Doudad
merci pour le complément Humouro-historique
c'est un régal
pescator

Bonjour à tous et bises aux dames,

La taxe 4 correspond bien à l'application du tarif en usage à l'époque.





Merci JF pour la "bibliothèque du Forum".

À bientôt.
Michel   qui rencontre assez souvent des lettres taxées sans marque dans cette période... sans avoir d'explication à fournir ! 

Je n'en suis pas à mon coup d'essai, à vrai dire, j'ai commis un article de 5 pages sur le sujet dans les FM (Lettre d'un officier français durant la guerre de succession d'Espagne), je ne me souviens plus du numéro. Si vous voulez le PDF, passez-moi un message avec votre mail.



L'étude des sceaux est en général fort captivante.

D.

LECOQ a écrit:

Cela n'explique pas l'absence de marque de départ à Paris.

Pour Doé, c'est à peu près normal, à cette époque, rien de forcément exceptionnel.

D.

Merci Doudad. La boucle est bouclée.
Bonne soirée.
François

Citation :

Pour Doé, c'est à peu près normal, à cette époque, rien de forcément exceptionnel.

D.

Ce que dit Doé est peut-être fondé lorsque qu'aucune indication ne figure sur les lettres... mais la présence de taxes (qui plus est, en accord avec les tarifs) montrent bien, a contrario, qu'il y a bien eu circulation postale.
C'est, en tout cas, mon avis, et je le partage !

À bientôt.
Michel