Bonjour
Voici une lettre mise à la boite de la commune rurale d'Aibes (lettre-timbre C) pour la commune de Solre le Chateau où se trouve un bureau de Direction.
Le facteur rurale la recueil à son passage dans cette commune et la rapporte à bureau qui appose son timbre à date au type 13. La lettre circule bien dans l'arrondissement rural du bureau de poste de Solre le Château.
Evidemment, à première vue, rien d'anormale sauf que.......
Que vient faire la frappe du décime rural supplémentaire sur cette lettre?
Comme dirait Bruno :
- bc92 a écrit:
Il parait que ça pédalait un peu dans la choucroute, aux débuts de la poste rurale en France.
Bruno
En fait, ici, nous ne serions pas trop dans la choucroute mais plus dans le système D.
Un petit rappel:Le timbre du décime rural devait être apposé sur toutes les lettres provenant ou à destination d'une commune rurale (sans bureau). Ce timbre est utilisé dès le 1er avril 1830 jusqu'au 1er janvier 1847. Il ne devait toutefois pas être apposé sur les correspondances circulant dans l'arrondissement rural d'un bureau (ville où se trouve le bureau ainsi que toutes les localités dépendantes de ce bureau). Le décime rural peut être frappé en rouge si la lettre provient d'une localité sans bureau et destinée à une localité hors de l'arrondissement rural où elle se trouve. Elle peut être en noir si celle-ci provient d'une localité où réside un bureau et destinée à une commune rurale hors arrondissement rural de ce bureau.
Le décime rurale, même si il est ici de la bonne couleur (rouge=recueil rural) n'a rien à faire sur cette lettre puisqu'elle circule dans l'Arrondissement rural de la commune de Solre. De plus, elle n'est pas taxée et n'a pas circulé en port payé.
En fait, il semble que le Directeur du bureau de Solre se soit servi du timbre du décime rural comme timbre de taxe de port local à 1 décime. Plus besoin d'écrire sur des dizaines de lettre chaque jour le chiffre "1".
Pas besoin de faire fabriquer à ses frais un timbre "1" comme dans d'autres bureaux, il avait déjà sous la main le matériel. Evidemment l'utilisation détournée de ce timbre était interdite:
Circulaire du 5 juin 1830, page 9: "
L'Administration a eu l'occasion de remarquer, que dans quelques bureaux, la correspondance locale est frappée du timbre du décime supplémentaire, au lieu d'être taxée à la plume, ainsi qu'il est prescrit par le règlement précité art. 20, articles 4,5 et 6. Je vous recommande, Monsieur, de veiller à ce que ces dispositions soient ponctuellement exécutées".
Mais malgré tout, 13 ans après cette circulaire (et sûrement d'autres nombreux rappels), le Directeur du bureau de Solre le Chateau déroge encore au réglement.
Cette pratique relevant du système D, ne pouvait avoir lieu qu'au sein de l'arrondissement de petits bureaux, là où il y avait peu de contrôle de inspecteurs et de l'Administration en général.
De plus et enfin, on ne peut pas croire que la frappe du décime supplémentaire soit un erreur (avec en plus l'oubli de la taxe concernant le port local), car la lettre est adressée au greffier d'un notaire. Les notaires de cette époque connaissaient bien les tarifs postaux. Le notaire Bever de Solre n'aurait pas payé le port plus le décime rural supplémentaire pour cette lettre précisément.
Pascal Choisy, dans son excellent , mais malheureusement sans suite, ouvrage sur "le Port local de la lettre ordinaire en Province" Tome 1 évoque le cas du timbre du décime utilisé de manière détournée.
Emmanuel.