bonjour,
vous qui êtes passionnés de sous-marins, vous connaissez forcément ceci :
Et non, ce n'est pas le Nautilus, ce n'est pas le Sous-Marin-Vert des Compagnons de la Chanson, c'est le
Garcibuzo de Cosme Garcia Saenz (aussi orthographié Saéz).
Pourquoi je vous parle de lui ? Et bien, parce qu'avant d'inventer le sous-marin, il a inventé une machine à timbrer pour le compte de l'Administration espagnole des postes, près de trente ans avant Eugène Daguin.
Les autorités espagnoles regrettant le manque de lisibilité des dateurs manuels appliqués par des postiers travaillant comme des cochons, l'ami Cosme eût l'idée géniale d'inventer une "
petite machine, qui se compose d'une armature de fer [d'acier, en réalité],
d'un piston et de plusieurs rouleaux qui prennent et répartissent l'encre contenue dans un réservoir sur une platine de bronze." Ceci permettant de timbrer plusieurs lettres avec une meilleure clarté et finesse qu'avec un timbre manuel (
dixit un acte notarié du 18 septembre 1857).
Ce n’est pas une blague, c’est même confirmé par une circulaire du 19 avril 1857 (Annales des postes) qui cite Don Cosme comme le constructeur d’une machine à timbrer les correspondances, qu’il faudra installer le plus tôt possible, et à laquelle est jointe une notice d’entretien. On y apprend comment nettoyer la bécane (avec de l’eau savonneuse). Le timbre doit être nettoyé à chaque changement de date, et il doit redevenir comme s’il n’avait jamais servi. Pareil pour le reste de la machine, deux fois par semaine. On rince à l’eau claire, et quand on ne s’en sert pas on couvre à cause de la poussière. On remplit l’encrier juste assez pour la journée, pour éviter que ça fasse de la patia.
Pour faire une belle empreinte, il est recommandé de lever et de baisser la manette au maximum, afin que l’encre se répartisse bien sur le rouleau et que le dateur s’applique bien sur le papier. Si l’encrage est irrégulier, c’est que le rouleau est de guingois, et on est prié de le remettre d’aplomb. Lorsque la machine est cassée (c’est prévu), un manche
ad hoc à visser sur le dateur permet de l’appliquer manuellement.
La machine est fournie avec les huits mois restants (on est en avril 1857), une poignée de chiffres pour faire les quantièmes (le millésime est monté sur le dateur, j’imagine), le manche
ad hoc et un tournevis.
Cent-cinquante machines ont été commandées en 1857, et 100 de plus en 1858 (budget des postes, annales)
Il est noté, dans une circulaire du 18/11/1858, que ces machines ont été fabriquées à l’étranger, la technologie espagnole ne permettant pas de la faire à la maison.
On trouve trace de Don Cosme sur Gallica, il est venu à Paris dans les années 1860, chez le Sieur Palis, 15 place de la Bourse, qui l’a aidé à faire breveter un bateau plongeur et un fusil qui se charge par l’arrière, on ne sait pas si c’est pour tirer depuis le bateau en question.
Ces marques sont connues jusqu’en 1870, et il faut bien avouer que le résultat est loin d’être spectaculaire de netteté et de finesse, comme disait le notaire en 1857. Cela dit, les oblitérations espagnoles des années 50/80 sont souvent archies pourries, donc, au Royaume des Aveugles ...
On n’a pas d’image de la machine (en tout cas je n’en ai pas), c’est bien dommage. J’ignore si ce Garcia a un rapport avec celui de 1928, qui s’acoquinera avec M. Klein.
D.
Merci à Rodolfo B. pour l'info.